Plus de la moitié du montant des amendes pénales reste impayé

Publié le : 27/03/2019 27 mars mars 03 2019
Source : www.dalloz-actualite.fr
par Pierre Januel

La commission des finances du Sénat a récemment diffusé un court rapport sur le recouvrement des amendes pénales. Alors qu’elles représentent près de 400 millions d’euros, plus de la moitié du montant de ces amendes n’est pas recouvrée. En cause notamment, l’archaïsme d’un système basé sur un logiciel des années soixante-dix.

Le rapport du sénateur Antoine Lefèvre indique que, hors compositions pénales, les juridictions pénales ont prononcé, en 2017, 209 000 peines d’amende fermes. Les amendes représentent près d’un tiers (32,3 %) des peines principales prononcées par les juridictions. Un Infostat de 2017 notait d’ailleurs que l’amende était devenue la peine principale la plus prononcée.

Le montant global de ces amendes (hors amendes forfaitaires, radars et amendes civiles, donc) représentait 385 millions d’euros en 2016. Une somme à comparer au 2 milliards que pèsent l’ensemble des amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuite versé à l’État. Toutefois, selon le rapport sénatorial, « un nombre significatif d’amendes pénales n’est pas inscrit au casier judiciaire ».

Concernant le recouvrement de ces sommes, il est impossible pour le Trésor public de distinguer ce qui relève des amendes et des droits fixes de procédure dus par toute personne condamnée. Mais, à partir des chiffres disponibles, la commission des finances du Sénat estime que, « fin 2017, le taux de recouvrement des amendes pénales prononcées en 2016 était estimé à 48 % », soit 168 millions d’euros. En comparaison, le taux de recouvrement des amendes forfaitaires majorées « radars » est de 30 %. Le Sénat a également calculé le paiement différencié des amendes en fonction des contentieux. Le taux de recouvrement des amendes est particulièrement faible s’agissant des escroqueries (16 %), stupéfiants (23 %) ou vols (25 %), alors qu’il est nettement supérieur pour les infractions de conduite sous l’emprise de l’alcool (67 %), de santé publique (69 %), d’environnement (75 %) ou d’homicide ou blessure involontaire (80 %).

Une application conçue dans les années soixante-dix

Le problème est ancien et était déjà au centre d’un rapport de 2007. La création des bureaux d’exécution des peines et la possibilité, depuis 2004, de minorer l’amende de 20 % en cas de paiement dans le mois, a permis un meilleur recouvrement. Toutefois cet abattement de 20 % a entraîné une perte de recettes évaluée à 13 millions d’euros par an.

Comme dans son rapport de 2007, le Sénat note que, pour améliorer la situation, il faudrait réformer un système archaïque. Les transmissions entre juridictions et les directions départementales des finances publiques (plus de 500 000 relevés de condamnation) se font encore par papier, et le Trésor public doit tout resaisir manuellement. Résultat, le délai moyen entre le jugement et la prise en charge par l’administration est de cinq mois, voire quatorze mois en Seine-Saint-Denis, ou encore deux ans en Guyane.

Pire, « l’application de recouvrement (AMD), conçue dans les années soixante-dix, ne permet pas de traiter les millions d’amendes qu’elle doit prendre en charge (dont les amendes pénales) », d’autant qu’il n’y a plus d’amnisties présidentielles pour « apurer le stock ». Si le remplacement du logiciel de Bercy est acté depuis plusieurs années, le projet est gelé, le ministère souhaitant d’abord repenser l’ensemble des systèmes d’information du recouvrement. Il travaille aussi à une réforme globale du recouvrement. Un rapport a été commandé sur la simplification du recouvrement fiscal et social, qui pourrait amener à la création d’une agence unique du recouvrement forcé.
 
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